Joël Le Scouarnec condamné à 20 ans de prison : un procès hors normes pour des crimes d’ampleur inédite

Reconnu coupable de viols et d’agressions sexuelles sur 299 victimes, l’ancien chirurgien de 74 ans écope de la peine maximale. Une décision qui marque un tournant judiciaire, mais qui n’éteint pas totalement l’affaire.

Après trois mois d’un procès éprouvant, la cour criminelle du Morbihan a rendu son verdict, mercredi 28 mai, à l’encontre de Joël Le Scouarnec. L’ex-chirurgien digestif, âgé de 74 ans, a été condamné à vingt ans de réclusion criminelle, la peine maximale prévue par la loi, pour 111 viols et 188 agressions sexuelles commis entre 1989 et 2014. Des actes d’une gravité extrême, perpétrés sur 299 victimes – en majorité des enfants, dont 256 avaient moins de 15 ans au moment des faits.

Un verdict sans appel, une rétention de sûreté écartée

Joël Le Scouarnec ne fera pas appel de sa condamnation. En détention depuis 2017, il pourra formuler une demande de libération conditionnelle à partir de 2030, une fois les deux tiers de sa peine purgés, comme le prévoit la période de sûreté fixée par la cour. La rétention de sûreté – placement à durée indéterminée dans un centre médico-judiciaire après la prison – requise par l’avocat général, n’a pas été retenue. La présidente de la cour a souligné que, bien qu’un risque de récidive existe, cette mesure devait rester exceptionnelle.

Le condamné fera également l’objet d’un suivi socio-judiciaire de 15 ans, assorti d’une obligation de soins pouvant aller jusqu’à sept ans. Il lui est désormais interdit d’exercer la médecine, de travailler, même bénévolement, au contact de mineurs, de posséder un animal, ou encore d’entrer en contact avec les victimes.

Des aveux complets et une posture assumée

Tout au long du procès, Joël Le Scouarnec a reconnu l’intégralité des faits. À la barre, il n’a demandé « aucune mansuétude », déclarant avoir « pris conscience de l’immense douleur » infligée à ses victimes. « Accordez-moi le droit de devenir meilleur », a-t-il imploré. Son avocat, Me Maxime Tessier, a insisté sur la sincérité de son client, soulignant que ses aveux n’avaient pas pour but d’obtenir une peine réduite mais de faire œuvre de vérité.

« Il n’a jamais cherché à amoindrir sa responsabilité », a plaidé l’avocat, appelant la cour à « lui appliquer la justice comme à tout autre accusé », en reconnaissant également les éléments d’humanité dans son parcours judiciaire.

Un feuilleton judiciaire loin d’être clos

Cette condamnation est la deuxième infligée à Joël Le Scouarnec, déjà reconnu coupable en 2020 de faits similaires sur plusieurs mineurs, et condamné à 15 ans de prison. Mais l’affaire pourrait connaître de nouveaux développements. Deux enquêtes sont encore en cours : l’une porte sur de potentielles victimes non identifiées ou récemment révélées, l’autre, contre X, cherche à déterminer si certains proches du chirurgien étaient au courant de ses agissements.

La dimension systémique de cette affaire interroge. Me Thibaut Kurzawa, autre avocat du prévenu, a rappelé que « s’il n’y a qu’un coupable, il n’y a peut-être pas qu’un seul responsable », pointant du doigt un possible silence collectif.