Le Rapport mondial sur le bonheur, publié le 20 mars dernier, met en lumière une tendance préoccupante : dans des pays tels que les États-Unis et le Royaume-Uni, les jeunes de moins de 30 ans connaissent un niveau de bonheur inférieur à celui de leurs aînés. Cette constatation remet en question l’idée que le bonheur soit réservé à l’âge mûr
Cette étude révèle également un resserrement, voire une disparition, de l’écart de bonheur entre les générations en Europe occidentale. De plus, dans des nations comme les États-Unis, le Canada, la Nouvelle-Zélande et l’Australie, cet écart est encore plus prononcé : les personnes âgées de plus de 60 ans affichent désormais un niveau de bonheur nettement supérieur à celui des moins de 30 ans.
« Des baisses alarmantes »
Le rapport mondial, instauré en 2012, se positionne comme un indicateur annuel du bien-être dans 140 nations. Il est géré par le Centre de recherche sur le bien-être de l’université d’Oxford, Gallup et le Réseau des solutions de développement durable de l’ONU. En se basant sur l’auto-évaluation du bonheur des individus ainsi que sur des données économiques et sociales, il intègre six facteurs majeurs : le soutien social, le revenu, la santé, la liberté, la générosité et l’absence de corruption. Selon le professeur Jan-Emmanuel De Neve, directeur du Centre de recherche sur le bien-être et principal rédacteur de l’étude, ce rapport met en lumière « des baisses déconcertantes [du bonheur des jeunes], en particulier en Amérique du Nord et en Europe occidentale », comme le rapporte le quotidien britannique The Guardian.
Après douze années où les jeunes de moins de 30 ans étaient mesurés comme étant plus heureux que les générations précédentes aux États-Unis, la tendance s’est inversée en 2017. Dans les enquêtes auprès des jeunes Américains, le pays le plus riche du monde se classe désormais 62e. Ce classement s’améliore à la 10e place lorsque l’opinion des personnes âgées de 60 ans et plus est prise en compte. Cette inversion de tendance est également observée, quoique dans une moindre mesure, en Europe. « La Norvège, la Suède, l’Allemagne, la France, le Royaume-Uni et l’Espagne sont des pays où les personnes âgées sont désormais nettement plus heureuses que les jeunes, tandis que le Portugal et la Grèce affichent une tendance inverse », détaille le rapport. Ainsi, la France se classe 25e lorsqu’on interroge les personnes âgées et 48e lorsqu’on écoute les plus jeunes.
La Finlande se trouve également dans cette « dynamique »
Un contraste similaire entre les différentes tranches d’âge est observable en Grande-Bretagne, où l’indice du bonheur est supérieur de 0,6 point chez les Britanniques plus âgés que chez leurs jeunes compatriotes.
En France, l’indice de bonheur, qui se maintenait autour de 6,5, est désormais presque identique quel que soit l’âge. Alors que chaque année depuis 2006, à une exception près, cet indice était plus élevé pour les moins de 30 ans que pour les Français âgés de 60 ans et plus.
Quant aux champions du bonheur finlandais, ils ne sont pas exempts de cette tendance, avec un indice de bonheur de 7,9 pour les plus âgés et de 7,3 pour les plus jeunes. Ainsi, les Finlandais de moins de 30 ans se retrouvent seulement à la 7e place du classement, la Lituanie, Israël et la Serbie occupant le podium.
La responsabilité des réseaux sociaux?
Le rapport dévoilé mercredi, basé sur l’auto-évaluation du bonheur des individus et des données économiques et sociales, ne fournit pas d’explications précises sur cette évolution. Néanmoins, des facteurs tels que la difficulté d’accès au logement, les disparités de revenus et les inquiétudes liées à la guerre et au changement climatique sont suggérés comme des pistes possibles.
Vivek Murthy met également en avant un autre facteur : les réseaux sociaux et leur omniprésence dans la vie quotidienne des adolescents américains. Il préconise ainsi la mise en place de mesures législatives visant à atténuer leurs effets néfastes, comme la limitation voire la suppression des boutons « J’aime » ou la possibilité de faire défiler à l’infini les messages.
Vivek Murthy défend également l’idée d’une action coordonnée à l’échelle mondiale pour renforcer les liens sociaux chez les jeunes, afin de lutter contre ce qu’il a qualifié dans un rapport récent d' »épidémie de solitude ».
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