L’ambulancier qui avait proféré des menaces envers un policier après la mort de Nahel a été exempté de peine, expliquant que l’émotion l’avait submergé.

Ce jeudi, au tribunal de Nanterre, Marouane D. et Amine Z. ont été jugés en comparution immédiate suite à la diffusion d’une vidéo dans laquelle Marouane D. s’en prend à un policier peu après la mort de Nahel.

Au sein du box des prévenus, Marouane D. ne peut contenir ses larmes lorsque Nahel est mentionné. À 31 ans, cet homme avait une relation étroite avec le jeune homme décédé lors de l’incident, considérant Nahel comme “presque son petit frère”. Mardi dernier, ses émotions ont pris le dessus, et il n’a pas pu retenir ses paroles.

Marouane D. a été jugé ce jeudi pour “outrage” envers un policier, et bien qu’il ait été reconnu coupable, il a été dispensé de peine. Le tribunal a tenu compte du contexte dans lequel ces mots ont été prononcés.

“Des menaces”

Le moment où les mots ont été prononcés remonte à mardi dernier lorsque l’ambulancier reçoit un appel de son ami lui annonçant la mort de Nahel, suivi de l’envoi de la vidéo montrant l’intervention policière. Marouane D. se trouve alors devant les urgences de l’hôpital Max-Fourestier à Nanterre. Dans les étages, le policier impliqué dans le tir est présent, escorté par d’autres policiers.

Marouane D., encore vêtu de sa tenue d’ambulancier, explique : “J’ai remarqué la brigade motocycliste que je venais de voir sur la vidéo, il y a tout ce monde-là, je le reconnais à son écusson. Quand je le vois, il me dit ‘bonjour’, je ne peux pas dire bonjour à quelqu’un qui vient de tuer quelqu’un que je connais.”

C’est à ce moment-là que Marouane D. s’en prend à l’un des policiers présents, en tenue de brigade motocycliste. Il lui lance : “Tu vas voir, tu vas payer, je vais t’afficher sur les réseaux, tu ne vas plus vivre tranquille, frère.” L’ambulancier, fraîchement diplômé, apprécié par son entreprise et père de deux enfants, est immédiatement interpellé, plaqué contre le mur et menotté.

Sincérité et amalgame

Aujourd’hui, avec une sincérité évidente, Marouane D. admet avoir fait un “amalgame”, réalisant qu’il n’avait pas en face de lui le policier responsable du tir mortel. Il présente ses excuses à plusieurs reprises.

“Pour moi, c’est comme si on avait tué mon petit frère”, confie Marouane, les larmes aux yeux. “Émotionnellement, cela me dépasse, j’ai simplement réagi sous le coup de l’émotion.”

Bien que le procureur qualifie les propos de Marouane D. de “plus que blessants”, il reconnaît que ces mots l’ont “dépassé en raison de la faute d’Amine Z.”. Ce dernier est le collègue de Marouane D. et est jugé pour “divulgation d’information personnelle”. Lorsqu’il a vu Marouane s’en prendre verbalement au policier, Amine a sorti son téléphone portable, filmé la scène et diffusé la vidéo en privé sur sa story Snapchat. Les trois policiers reconnaissables sur la vidéo ont porté plainte.

“Story Snapchat”

Devant le tribunal, cet homme de 32 ans affirme avoir publié la vidéo dans sa story Snapchat “par habitude”, car il filme régulièrement son quotidien, mais aussi par souci de se protéger en cas d’accusations liées à l’altercation avec son collègue. “Je ne le fais pas exprès, je filme tout le temps”, explique-t-il. “Ce n’était pas dans le but d’afficher ou de nuire à qui que ce soit, je m’excuse, je n’aurais pas dû filmer.” Son post a été parfois partagé avec des messages tels que “C’est ce FDP qui nous a enlevé notre frère. Si vous le voyez, n’hésitez pas”, accompagnés parfois d’images d’armes à feu. Ces messages ne sont pas de la responsabilité d’Amine Z.

“Il est pleinement conscient des conséquences de ses actes”, a tranché le procureur de la République de Nanterre, qui a requis une peine de 12 mois de prison.

Pour les avocates de la défense, le contexte a joué un rôle dans cette affaire. “Je doute que le fonctionnaire de police aurait porté plainte s’il n’y avait pas eu la vidéo”, plaide Me Mauger-Poliak, l’avocate de Marouane D., estimant que si cette affaire n’était pas liée à Nahel, il n’y aurait jamais eu de poursuites ni même d’interpellation. “L’émotion ne doit pas prendre le pas sur le respect du droit”, ajoute l’avocate d’Amine Z., soulignant que son client n’avait jamais eu l’intention de nuire au policier. Amine Z. a été relaxé.

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