Afin de « prendre en charge les voyageurs sans solutions », la préfecture de Haute-Corse a ouvert un gymnase jeudi soir pour accueillir les passagers bloqués à l’aéroport de Bastia
L’île de Beauté paralysée : conflit sur la gestion des ports et aéroports
La Corse est plongée dans un climat de tension, provoqué par un désaccord entre la Collectivité de Corse et l’État concernant l’avenir de la gestion des infrastructures portuaires et aéroportuaires de l’île. Ce jeudi 4 octobre, un mouvement de grève spontanée a bloqué les quatre aéroports et les six ports de l’île, laissant plusieurs centaines de voyageurs désemparés. Le mouvement a été initié par le Syndicat des Travailleurs Corses (STC) de la Chambre de Commerce et d’Industrie (CCI), en réponse à la position de l’État jugée inacceptable par les autorités locales.
Pour faire face à cette situation de crise, la préfecture de Haute-Corse a réagi en ouvrant un gymnase jeudi soir à Bastia, afin d’héberger temporairement les passagers coincés sur place.
Un bras de fer autour de la gouvernance des infrastructures
L’origine du conflit remonte à une assemblée générale extraordinaire de la Chambre de Commerce et d’Industrie de Corse, durant laquelle Alexandre Patrou, secrétaire général aux affaires corses, a présenté la proposition de l’État de créer deux Syndicats Mixtes Ouverts (SMO) portuaire et aéroportuaire d’ici la fin de l’année. Ces nouvelles structures devraient, selon les statuts prévus, accorder des concessions à la CCI pour lui permettre de continuer à gérer les infrastructures au-delà du 1er janvier 2025. Toutefois, cette configuration a été perçue comme un « risque juridique » par l’État, ce qui a déclenché la colère du président du Conseil exécutif de Corse, Gilles Simeoni.
La réaction ferme de Gilles Simeoni
Gilles Simeoni, l’homme fort de la politique insulaire, a vivement réagi en dénonçant ce qu’il considère comme une trahison de l’État :
*« C’est une déclaration de guerre et je vous le redis, pour moi ce n’est pas négociable, il n’y aura pas de groupes internationaux qui gèreront les ports et les aéroports de Corse »,* a-t-il déclaré, fustigeant l’État pour avoir pris une décision « en catimini », sans consultation préalable, et pour avoir renié ses engagements.
L’État tente de désamorcer la situation
Face à la montée des tensions, le préfet de Corse, Amaury de Saint-Quentin, a tenu à apaiser les inquiétudes en précisant que l’État n’avait * »aucune opposition »* à ce que la gestion des infrastructures soit confiée à des SMO, mais a souligné que cette gestion devait impérativement se faire en **régie directe** pour prévenir tout risque juridique. Il a également démenti toute intention de privatiser les ports et aéroports de l’île : *« Il n’y a aucune velléité de confier la gestion à des groupes privés »,* a-t-il insisté.
Un conflit d’intérêts doublé d’une bataille financière
Derrière ce débat sur la gouvernance des infrastructures se profile également un enjeu financier. Gilles Simeoni réclame à l’État une rallonge budgétaire de **50 millions d’euros**, nécessaire pour compenser l’inflation et garantir la continuité territoriale entre l’île et le continent. Une demande qui ajoute une dimension supplémentaire à ce bras de fer entre Paris et la collectivité insulaire.
Pour l’heure, l’île de Beauté reste paralysée, tandis que l’avenir de la gestion de ses ports et aéroports demeure incertain.