Christophe Ruggia en procès pour agressions sexuelles : cinq ans après le témoignage d’Adèle Haenel
Le réalisateur Christophe Ruggia se retrouve devant le tribunal correctionnel de Paris ce lundi 9 et mardi 10 décembre 2024 pour répondre de faits d’agressions sexuelles sur mineure, alors qu’Adèle Haenel, aujourd’hui âgée de 35 ans, est appelée à témoigner comme partie civile. Ces accusations, dénoncées publiquement par l’actrice en 2019, sont au cœur d’un procès qui s’inscrit dans le contexte de la vague #MeToo qui a secoué le cinéma français.
Les révélations d’Adèle Haenel
En novembre 2019, Adèle Haenel, actrice reconnue pour ses rôles dans des films tels que Portrait de la jeune fille en feu, publie un témoignage dans Mediapart, affirmant avoir été victime de comportements inappropriés de la part de Christophe Ruggia lorsqu’elle était mineure, âgée de 12 à 15 ans, durant le tournage de Les Diables en 2001. Le réalisateur, qui avait alors 36 ans, est accusé d’attouchements et de harcèlement sexuel. Ruggia a toujours nié les faits et réclame un droit de réponse, arguant qu’aucun acte de violence ne s’était produit.
Une relation ambigüe qui se construit sur le tournage
Le tournage de Les Diables s’est déroulé de juin à septembre 2001, alors qu’Adèle Haenel n’avait que 11 ans. Le film, racontant l’histoire d’un frère et d’une sœur autistes, a marqué le début d’une relation qui s’est intensifiée, selon l’actrice, par des gestes affectueux déplacés tels que des baisers sur les joues et des mains sur les hanches. Adèle Haenel raconte aussi avoir été isolée sur le plateau, ses parents et sa nourrice étant écartés, et l’équipe du film instruite de ne pas la déranger pour ne pas la déconcentrer.
Des rencontres inquiétantes après le tournage
Le comportement de Christophe Ruggia ne s’est pas limité au tournage. Entre 2001 et 2004, Adèle Haenel se rendait régulièrement chez lui pour ce qui était présenté comme un « apprentissage cinématographique ». Ces visites ont été décrites par l’actrice comme des moments marqués par des caresses sur les cuisses et des tentatives de rapprochement sexuel, souvent interrompues par des tentatives de résistance de sa part. Elle a décrit ces interactions comme des actes de manipulation, Ruggia réagissant avec un air choqué pour désamorcer ses objections.
Les témoins et les preuves
Les témoignages des proches d’Adèle Haenel, notamment de son frère, confirment qu’elle semblait sous pression, qualifiant ces visites de « contrainte » et observant un changement de comportement chez elle. Des perquisitions menées lors de l’enquête ont révélé des preuves inquiétantes, telles que des recherches sur Internet concernant Adèle Haenel et des lettres dans lesquelles Ruggia exprimait un amour « sincère mais lourd à porter ».
Un procès pour la reconnaissance des victimes
Adèle Haenel, qui a quitté le cinéma en 2023 pour dénoncer l’hypocrisie de l’industrie vis-à-vis des agresseurs, se bat aujourd’hui pour que son témoignage serve de prise de conscience. Le procès de Christophe Ruggia représente bien plus qu’une simple procédure judiciaire : il est un test pour la société française sur sa capacité à protéger les mineurs et à soutenir les victimes d’agressions sexuelles. Ruggia encourt jusqu’à 10 ans de prison et 150 000 euros d’amende, et ce procès pourrait marquer un tournant pour d’autres victimes qui se sentent aujourd’hui prêtes à s’exprimer.