Mohamed Ghraieb et Chokri Chafroud ont été jugés coupables ce jeudi 13 juin pour « association de malfaiteurs terroristes » en raison du soutien « idéologique » et « logistique » qu’ils ont fourni au tueur, Mohamed Lahouaiej-Bouhlel
Le verdict est tombé lors du procès en appel de l’attentat de Nice. Les deux accusés, Mohamed Ghraieb et Chokri Chafroud, ont été condamnés à 18 ans de prison, avec une période de sûreté de deux tiers.
Mohamed Ghraieb est également interdit de séjour dans les Alpes-Maritimes, tandis que Chokri Chafroud est interdit de séjour sur tout le territoire français. Ils sont tous deux inscrits au fichier des auteurs d’infractions terroristes.
Ces deux amis du terroriste Mohamed Lahouaiej-Bouhlel, qui a tué 86 personnes le 14 juillet 2016 sur la promenade des Anglais, étaient les seuls à avoir fait appel de leur condamnation. En première instance, en décembre 2022, ils avaient déjà écopé de 18 ans de prison.
« Un sens moral défaillant »
Naïma Rudloff, l’avocate générale, avait requis une peine maximale de 20 ans de prison contre ces deux ressortissants tunisiens, contre 15 ans en première instance.
La représentante du ministère public a souligné le « soutien idéologique » et « logistique » qu’ils ont apporté au terroriste, bien qu’elle ait estimé qu’ils n’étaient ni complices ni co-auteurs.
« Chez ces trois hommes, on retient le ressentiment, la victimisation, la duplicité et un sens moral défaillant, tous des leviers puissants qui peuvent mener au terrorisme », a-t-elle développé.
Les avocats plaidaient l’acquittement
Mohamed Ghraieb, ancien réceptionniste dans un hôtel, est considéré par l’accusation comme le moteur de la radicalisation du futur tueur. Après avoir nié, il a admis avoir échangé avec Mohamed Lahouaiej-Bouhlel des messages de haine sur les réseaux sociaux.
Ses avocats ont plaidé son acquittement, affirmant qu’il ignorait le projet d’attentat. Mohamed Ghraieb « n’est pas lié à l’arme » détenue par Mohamed Lahouaiej-Bouhlel et « n’a pas participé à la location du camion », ont-ils soutenu.
Chokri Chafroud, migrant sans-papiers, n’était pas non plus au courant du projet, selon ses avocats. Ils ont tenté de démonter point par point les arguments du ministère public, s’appuyant notamment sur les témoignages des proches de l’assaillant, comme son amant, « qui lui-même n’a pas su déceler sa radicalisation ».
Un fond d’écran comme « baiser du Judas »
Les avocats ont rappelé que des éléments retrouvés dans l’ordinateur du tueur, comme des vidéos d’accidents de poids lourd, illustraient ses aspirations bien avant sa rencontre avec Chokri Chafroud.
Selon eux, les accusations reposaient sur des hypothèses. Décrit comme « sans personnalité, ni intelligence pour être un mentor », Chokri Chafroud ne pouvait pas, selon les avocats, avoir poussé le terroriste à l’acte.
Finalement, c’est un piège tendu par Mohamed Lahouaiej-Bouhlel qui a conduit Chokri Chafroud sur le banc des accusés, a conclu un des avocats. Une photo des deux hommes utilisée comme fond d’écran sur le téléphone du tueur a été vue comme un signe de proximité ou de complicité. Pour l’avocat, « cette photo est un baiser de Judas que Mohamed Lahouaiej-Bouhlel a emporté dans sa tombe et qui aura scellé pendant huit ans la culpabilité de Chokri Chafroud ».