Déclassement du loup : une décision attendue mais regrettable, selon l’Union internationale pour la conservation de la nature
L’annonce n’a surpris personne, mais elle n’en reste pas moins déplorée par les défenseurs de la biodiversité. Mardi 3 décembre, Maud Lelièvre, présidente du comité français de l’Union internationale pour la conservation de la nature (UICN), a réagi sur franceinfo à la décision des 49 États membres de la Convention de Berne. Ces derniers ont acté un déclassement du statut de protection du loup, le faisant passer d’espèce « strictement protégée » à simplement « protégée ». Cette mesure, réclamée par de nombreux éleveurs, facilitera désormais l’abattage du prédateur.
Une décision contestée mais anticipée
« C’était une décision que nous redoutions depuis des années », confie Maud Lelièvre. Selon elle, ce choix illustre une incompréhension persistante du rôle fondamental du loup dans les écosystèmes. « Depuis 2019, la Norvège remet en question la Convention de Berne, et en 2022, la Suisse avait déjà attaqué le statut du loup », rappelle-t-elle, soulignant un glissement progressif vers cette issue.
Le loup : un régulateur essentiel de la biodiversité
« En tant que prédateur au sommet de la chaîne alimentaire, le loup joue un rôle vital dans la régulation des populations d’ongulés tels que les cerfs et les chevreuils », explique Maud Lelièvre. Cependant, elle admet que la coexistence entre les grands prédateurs et les activités humaines reste complexe, notamment dans le secteur agricole.
Depuis plusieurs années, les associations de protection de la nature plaident pour des alternatives efficaces afin de limiter les prédations : clôtures électriques, chiens de protection (comme les patous), ou encore la surveillance renforcée des troupeaux. Ces méthodes, bien qu’efficaces, ne peuvent garantir un « risque zéro ». Pourtant, selon des données de la Commission européenne, les loups ne seraient responsables que de 0,065 % des pertes du cheptel ovin européen, un chiffre très modeste au regard des inquiétudes exprimées.
Une mesure aux conséquences controversées
Maud Lelièvre s’inquiète également des effets pervers des abattages : « Les loups vivent en meutes avec une organisation sociale complexe. Les abattages aléatoires risquent de désorganiser ces groupes sans forcément éliminer les individus responsables des attaques sur les troupeaux. »
Bien que la population de loups en Europe ait doublé en une décennie pour atteindre environ 20 300 individus en 2023, la situation est loin d’être homogène. « Sur neuf sous-espèces présentes en Europe, six sont classées vulnérables ou quasi-menacées », précise la présidente de l’UICN, s’appuyant sur le baromètre des espèces de l’organisation.
En conclusion, si cette décision marque un tournant, les défenseurs de la biodiversité insistent sur l’importance de trouver des solutions durables permettant la coexistence entre l’homme et cet animal emblématique. « Les loups étaient là avant nous », rappelle Maud Lelièvre, « et il est de notre responsabilité d’assurer un équilibre ».